J22 : Don Det
Lever beaucoup plus matinal (9h) pour départ à
10h, nous louons des vélos au coin de la rue et descendons vers le sud de l’île
par la piste est puis vers l’île suivante Don Kon, les 2 étant reliées par un
pont. Il s’agit d’une ancienne voie ferrée construite par la France à l’époque
coloniale pour faire du Mékong l’axe commercial de l’Asie du Sud-Est et pouvoir
remonter jusqu’en Chine. Pour atteindre cet objectif, les nombreux rapides qui
entourent les 4000 îles et notamment à l’ouest de Don Kon étaient un problème
et furent donc construits 2 ports pour décharger puis recharge les bateaux à la
pointe sud de Don Kon et à l’est de Don Det et entre les 2 une voie ferrée de
10 kilomètres avec un pont entre les 2 îles. C’est le but de notre balade. En
descendant Don Det nous apercevons le Jungle Bar où une soirée est organisée le
soir même ; ça fait tout de même un peu loin (15 minutes de marche depuis
notre bungalow), nous traversons le pont et feintons le péage d’entrée de
l’île, puis un chemin caillouteux sur lequel à part quelques touristes à vélos,
nous croisons nombre de mini-bus/Sawngthaew qui descendent les groupes de touristes
(dont un paquet de Chinois) faignants ou gros à l’extrémité sud de l’île pour y
prendre un bateau et aller voir les dauphins de l’Irrawady, une espèce de
dauphin d’eau douce menacée, puis les emmener aux chutes La Phi (« des
esprits »). Arrivés au point le plus méridional de l’île (l’un des plus
méridional de tout de Laos) on nous propose le tour en bateau mais nous
refusons malgré la fascination de la vue sur les nombreuses îles et le
Cambodge, de l’autre côté, où nous nous rendons le lendemain. Puis nous
reprenons les vélos à la recherche de la route longeant la côte ouest pour nous
rendre aux chutes. Par hasard le chemin nous même à une belle plage avec un
restaurant où tous les kayakistes sont réunis dont les 3 Allemandes de notre
Guesthouse à Vang Vieng. Le tour de kayak d’une journée incluant deux chutes
sur le Mékong et l’excursion dauphin semble comporter bien plus de marche et de
temps morts que ces personnes ne l’avaient imaginés. Lucie reste là mais Luke
et moi décidons de remonter le Mékong en sautant sur les gros rochers qui le
parcourent à cet endroit pour rejoindre la cascade pour éviter de devoir payer
l’entrée. Mais c’est quasiment l’heure la plus chaude de la journée (14h) et il
semble que la cascade soit bien plus loin que prévu, aussi, nous finissons par
renoncer. Une fois de retour à la plage nous somme bien en sueur ; le
moment idéal pour un bain dans le Mékong. Lucie en fait de même et je trouve le
moyen de m’écorcher le pied. Pas vraiment ce dont j’avais besoin avec déjà toutes
celles de Vang Vieng. Nous reprenons nos bicyclettes pour enfin arriver aux
chutes qui finalement ne coûtent que 1000 Kips –beaucoup d’efforts pour rien
donc, enfin pour la beauté du Mékong à cet endroit paradisiaque. Nous admirons
donc les chutes, pas très hautes (2 à 3 mètres) mais très large et surtout
puissantes. A la saison humide cela doit être vraiment impressionnant !
Nous rejoignons la pointe nord de l’île, traversons le pont et suivons la voie
ferrée jusqu’au ré-embarcadère, on pourrait dire, situé sur la côte est de Don
Det, à peu près au milieu et qui sert maintenant de base de départ pour les
minibus dont j’ai parlé plus haut. Arrêt suivant : la guesthouse pour une
douche bien méritée et pour payer notre séjour : 3 nuits à 25,000 soit
1,25€ la nuit ! mais on ne peut pas trop se délasser car il faut être à
16h au « Pai in Laos » qui organise tous les soirs un tour en bateau
gratuit pour admirer le coucher du soleil sur une toute petite île –limite un
banc de sable. Nous gardons donc les vélos pour nous y rendre plus rapidement,
tellement rapidement que je roule sur un poulet le tuant à moitié. C’est cons
les poulets. Et je parle pas des coqs ! 2 bateaux chargés de gens, d’une
glacière pleine de bières pour déguster sur place, et de pas mal d’herbe avec
La en figure de proue de l’une, et navigation de 20 bonnes minutes pour
atteindre la fameuse île de sable au milieu du Mékong. En arrivant, on
s’installe sur le sable, chacun se saisit d’une bière ; les conditions idéales
sont réunies pour apprécier à sa juste valeur un coucher de soleil enchanteur.
Une fois de retour au « Pai » nos estomacs gargouillent tellement que
nous filons dare-dare ) notre canine pour y déguster une dernière fois les
merveilles culinaires de la maîtresse de maison. En plus, nous sommes devenus
de vrais bon clients, nous y avons nos habitudes à présent : de plus
grosses portions épicées à souhait (« Makh-Té ») nous sont préparées
et la veille la cuisinière nous avait offert d’acheter du poisson le lendemain
matin pour que je puisse enfin essayer une de ses spécialités à base de poisson
(jusque là nous étions limités au bœuf et au poulet). Ce sera donc le cas pour
cette soirée de fête avec 3 belles tranches de poissons frits du Mékong –Luke
se satisfera une fois de plus de son curry-coco et Lucie ne pourra pas terminer
sa salade de papaye mais sans papaye et avec du concombre : trop
pimenté ! Mauvaises habitudes que les nôtres ! Nous repassons au
bungalow et Luke, un peu malade, ira se coucher directement, nous laissant
Lucie et moi aller seuls, dans l’obscurité la plus totale, au jungle bar avec
nos bicyclettes. Il s’agit d’une maison en bois au milieu d’un terrain,
barbecue et feu de bois dehors, tables basses et coussins pour s’asseoir à même
le sol « dedans » -assez similaire au « Pai » finalement.
J’y retrouverai Casey, l’Australienne, discuterons avec un cuisiner français
qui a acheté le terrain voisin et y a fait construire sa maisons il y a 3 ans.
L’appel du lit se fait bientôt plus fort surtout que Lucie part à 9h pour son
excursion en kayak et nous avons décidé d’enfin nous rendre au Cambodge et nous
voulons profiter du bateau des groupes ayant acheté un bus direct auprès d’une
agence, soit 9h30. La soirée se terminera tout de même à tchatcher dans les
hamacs de notre balcon. Que la vie est dure !
J23 : Don Det – Kompong Cham
Le réveil sonne mais je me rendors puis émerge vers 9h10.
Il faut faire vite ! Mais je cherche Luke et Lucie en vain. Une fois sur
la rue principale je les trouve en train de boire un iced-coffee. Je demande à
Lucie si elle n’avait pas rendez-vous à 9h. Elle me répond :
« oui, quelle heure est-il ? » Je lui dit 9h15 alors elle part
en courant au lieu de rendez-vous en nous criant au revoir de loin. Nous
retournons prendre nos affaires à la guesthouse et il est 9h35 quand nous nous
pointons sur la plage qui sert d’embarcadère : pas un chat ! Nous
regardons un peu aux alentours et cherchons un éventuel groupe. Rien. On nous
apprend que les rendez-vous des groupes pour le Cambodge étaient à 8h. Bon. Un
jeune Cambodgien qui travaille pour l’agence de voyage/bus devant laquelle nous
nous trouvons nous explique qu’il n’est pas possible de traverser la frontière
par nos propres moyens avec les transports locaux. Il finit par me convaincre
et moi Luke et nous lui achetons le billet qui inclut bateau/minibus/bus jusque
Stung Trep, la première grande ville derrière la frontière pour US$15 sous la
promesse qu’il appelle son chauffeur (nous supposons le même que celui de ceux
qui sont partis à 8h ce matin) pour qu’il nous attende. Le prix est tout de
même une arnaque mais frontière rime souvent avec arnaque… Après très peu
d’attente nous embarquons à deux dans un longboat local (c’est à dire plus
étroit et sans siège) et 10-15 minutes après nous remontons la berge. Le
marinier ne nous suit pas et nous indique seulement la route principale. Nous
montrons notre billet et on nous invite à aller un peu plus loin. Arrivé au
restaurant qui fait office de billeterie/terminal de bus, nous trouvons déjà
des gens installés et on nous informe que le bus ne devrait pas tarder. En
face, même chose pour le restaurant/terminal sûrement d’une autre compagnie
dont je questionne les personnes. Ils sont bien un de ces groupes partis à 8h
du matin de l’île et deux heures plus tar ils n’ont fait que traverser le
Mékong. Et dire que la plupart vont à Siem Reap et ont encore 10 heures de bus
devant eux ! Quant à nous, nous attendrons une petite demi-heure qu’un
minibus arrive sur lequel nos sacs sont arrimés avant de nous entasser à 12
dedans. Heureusement que la frontière n’est qu’à 20 minutes de route. Une toute
nouvelle arche est en train d’être construite que nous contournons pour nous
rendre aux guichets de sortie du pays pour commencer une intense série de soutirage
d’argent de la part des officiers des frontières. Au Laos, pour obtenir le
tampon de sortie, on nous demande 20,000 LKI parce que c’est dimanche. Une fois
passé sous une barrière nous marchons 200 mètres à travers le No Man’s Land
avant de tomber sur une femme derrière une table au bord de la route. On exige
de nous US$1 et on nous donne un papier à remplir tout en prenant notre
température (pour la grippe aviaire sans doute) puis on nous invite à nous
diriger vers une maison en bois de l’autre côté de la rue : le bureau des
visas. Là, nouveau papier à remplir (carte d’entrée/sortie du pays), l’officier
me parle en français ; ce qui fait bizarre après n’avoir rencontré
jusqu’ici de tout le Laos uniquement un vieux mafieux qui parlait français ;
et demande une photo et US$23 (normalement c’est 20) plus $2… parce que c’est
dimanche ! Les formalités effectuées nous chargeons nos sacs dans le bus
qui nous attend de l’autre côté. Il semble que nous soyons les seuls à vouloir
nous arrêter à Stung Trep – tous les touristes vont directement à Siem Reap. 20
minutes plus tard quand tout le monde a terminé ses formalités et est monté
dans le bus, plein à craquer, il se met en route. Rapidement le bus s’arrêtera
pour faire monter des femmes et des enfants, à qui Luke et moi cèderons nos
places et nous serons donc assis dans le passage central sur des petits
tabourets. Un des employés du bus, très sympathique et parlant un anglais
correct nous fera la conversation et nous enseignera nos premiers mots en
Khmer. Il descendra à Kratie –car entre temps un de ses collègues a réussi à
nous vendre le billet pour que nous prolongions le trajet jusque Kompong Cham.
Mais mon idée est arrêtée, je vuex voir cette ville avec l’unique pont sur le
Mékong de tout le Cambodge. Premières impressions du pays depuis la fenêtre du
bus : le soleil tape, il fait chaud et tout est plat. Incroyablement plat.
Les rizières agrémentées de palmiers à perte de vue sont remplies d’eau
contrairement au Laos où le riz était déjà récolté et où les paysans faisaient
les foins. La nuit tombe à peine quand nous traversons l’impressionnant pont
sur le Mékong, le bus continue, continue, continue, ne semble pas vouloir
s’arrêter jusqu’à ce que je demande : ils nous avaient oubliés ! Et
maintenant nous somme à 2-3 kilomètres du centre, et pas 1 kilomètre comme les
employés du bus nous disent alors que nous essayons de faire en sorte qu’ils
nous payent le tuk-tuk pour le centre-ville, mais pas moyen. Tout d’un
coup quand il s’agit d’argent, plus personne ne parle anglais ! Nous
marchons donc vers la ville plusieurs minutes avant qu’un vieil homme sur son
scooter s’arrête et propose de nous emmener. Nous essayons à 3 avec nos 2
backpacks sur le scooter mais ça ne sera pas possible et finalement un autre
chauffeur s’arrêtera aussi et nous négocions $1 pour les 2 Nous découvrons LE moyen de transport du
Cambodge : la moto ! Au bord du Mékong, nous finirons par dégoter une
guesthouse miteuse, la chambre la plus pourrie où j’ai dormi de tout le voyage
que nous n’arriverons même pas à négocier à moins de $4… La première activité
fun sera la chasse au cafard dans la salle de bain pour pouvoir prendre une
douche. Nous sortons ensuite dîner et suivons le conseil du Lonely Planet du
dîner pour la bonne cause. Un peu plus loin au bord du fleuve se trouve le
restaurant Smile tenu par une ONG qui a pour but de former de jeunes
Cambodgiens aux métiers de la restauration. Nous serons tout simplement bluffé.
Pour une première expérimentation de la cuisine Khmer, nous aurons le droit à
un régal des papilles, le tout pour un prix plus qu’abordable ($4 le plat) du
coup nous n’hésitons pas à prolonger le plaisir et la générosité avec dessert
et whisky pour digérer. Au final l’addition de $10 par personne en fera le
repas le plus cher de notre voyage jusqu’à présent mais ce sera sans le moindre
regret. Luke tombera en extase pour le lok-lak : du bœuf sauté avec un œuf
au plat agrémenté d’une sauce sel-poivre-citron. Quand le poivre est aussi bon
que celui qu’on trouve au Cambodge, c’est un régal. Les autres plats de la
carte sont tout aussi réussis : on sent la recherche de la finesse et
l’équilibre dans la moindre des sauces, y compris un curry de base. Il fera bon
contempler le ballet des geckos sur les murs du restaurant une fois la nuit
tombée. Du coup il est près de 23h quand nous sortons du restaurant à la
recherche d’un distributeur de billets où nous ne pourrons retirer que des
dollars (ce qui sera le cas dans tout le pays : étrange un pays où les
distributeurs de billets ne fournissent pas la monnaie locale !) Il faudra
donc retourner le lendemain à l’heure d’ouverture pour changer nos dollars en
Riels au guichet. Pour demain aussi internet. Il est définitivement trop tard
pour trouver une échoppe ouverte et tandis que nous longeons un
« bar » local ouvert dans une arrière rue sombre à la terrasse duquel
quelques jeunes Cambodgiens sirotent quelques bières, nous les entendons nous
appeler : « Hello ! » Même dans l’obscurité, deux
occidentaux qui passent dans la rue ne passent pas inaperçus. Nous nous
décidons à répondre à leur sollicitation pour une ou deux bières. Le groupe de
jeunes (5 garçons et 2 filles) sera enchanté bien que ne parlant pas tous
anglais de commander plusieurs carafes de bière pour nous arroser avec
abondance et tandis qu’un mec gay au moyen d’une papier mal écrit en anglais me
fera comprendre que je plais à sa sœur, la plus jolie des 2 filles (ils savent
être directs quand la langue pose problème, je l’avais déjà noté au Laos), un
autre gay plus extraverti, limite ladyboy passera toute la soirée à faire des
avances concrètes (il se montrera très tactile) à Luke malgré la clarté du
refus de ce dernier. Mais face à leur gentillesse et leur générosité (un des
mecs payera la bière pour tout le monde) nous décidons d’oublier les plans de
visite du lendemain et d’aller en boite de nuit avec eux. Nous montons à 2-3
personnes par scooter (le leur pour eux et celui d’une chauffeur pour nous) et
nous traverserons le pont une deuxième (puis plus tard une troisième), la boite
se trouvant sur l’autre rive. Ce sera une expérience inoubliable. Nous fûmes
bien évidemment les seuls occidentaux de la boite et donc l’attraction de la
soirée. Ce fut très amusant de faire la fête, danser et boire avec eux. Une
fois de retour en ville, un des mecs me fît encore plus clairement comprendre
que la jolie fille avait besoin d’un toit pour passer la nuit et je lui
offrirai donc le mien –même si elle ne s’attendait sûrement pas à ce que nous
logions aussi piteusement- et Luke découvrira les joies de la « mate card » balcon.
J24 : Kompong Cham –
Phnom Penh – Kampott
Au réveil avec peu
d’heures de sommeil –il n’est encore que 9h- la première chose que la miss fait
est d’appeler quelqu’un sur son téléphone portable. Peu de temps après je
comprends que ses amis ladyboy et celui qui m’a poussé dans ses bras sont venus
la chercher -au moins ce n’est pas pour me tomber dessus. Luke attend déjà
désespérément depuis plus de deux heures de pouvoir réintégrer la chambre, le
soleil l’ayant réveillé et la chaleur l’empêchant de dormir plus avant. Il sera
dur de convaincre les 3 que nous ne souhaitons pas sortir petit-déjeuner avec
eux de suite, qu’il nous faut nous laver et dormir encore un peu. Je leur dis
que nous pourrions nous retrouver dans 1h-1h30 mais la barrière de la langue
est très grande et finalement nous nous séparons. Je m’allonge pour une petite
sieste d’une demi-heure qui deviendra une sieste de trois heures. Il est midi
passé soit l’heure de sortir déjeuner au Smile. Avant nous passons à la banque
changer notre argent. La qualité du repas sera encore une fois loin de nous
décevoir. Nous faisons le tour des 3 compagnies de bus pour savoir laquelle
offre le premier départ pour Phnom Penh et à 13h, la dernière à laquelle nous
demandons a un départ 15 minutes plus tard. Le timing est donc plus que serré
pour repasser à notre guesthouse faire les sacs, payer la nuit et revenir. Nous
prenons tout de même les billets en nous faisant assurer que le bus nous
attendra. Il nous faut plus de 10 minutes pour rentrer à pied. Puis on nous
demande $10 au lieu de 4 pour la nuit sous le prétexte que nous n’avons pas
fait le check-out avant midi. Après une longue négociation nous nous entendons
sur 16,000 Riels ($6). Il nous reste moins de 5 minutes pour retourner à
l’agence de bus, aussi le gérant de la guesthouse qui voit que je cherche une
moto, prend la sienne, fait 200 mètres, revient avec une autre et nous y emmène
pour R2000 par personne. En arrivant un bus est stationné mais des européens
nous indiquent que c’est celui qui vient de Phnom Penh duquel ils descendent
juste. Dommage, le père avait 3 filles tout bonnement magnifiques… Nous leur
recommandons le Smile puis on nous indique un minibus dans lequel nous devons
monter, nos sacs entassés dans le minuscule espace à bagage de 20 centimètres
entre la porte du haillon et le dossier de la banquette arrière sur laquelle
nous nous installons. Il y avait bien un bus mais comme il est plein on aura le
droit d’être entassé dans un minibus. Un des arrêts sera à Skuon, célèbre pour
ses araignées frites qu’essaieront de nous vendre plusieurs de la horde de
vendeurs assaillant notre bus à son arrivée au terminal –la plupart des petites
filles extrêmement démunies qui n’ont que des mangues, papayes et ananas pelés
et découpés dans un mini-sac plastique- mais nous n’oserons pas goûter. En fin
d’après-midi nous atteignons enfin Phnom Penh, la montagne de Penh –du nom de
la vieille femme sensée avoir fondé la ville. Le choc est radical ; après
n’avoir pratiquement pas vu une ville digne de ce nom au Laos ainsi que
quasiment aucun véhicule privé, ici c’est une vraie métropole asiatique envahie
d’autos et de vélos, scooters et autres moyens de transport qui se faufilent
les uns entre les autres au pied de gigantesque tours, la plupart en
construction –la Chine investissant massivement dans la capitale cambodgienne
ces dernières années, rachetant des surfaces en masse soit pour les construire
soit pour les revendre avec une grosse marge. A cause des rues complètement
bouchées, il nous faudra plus d’une heure pour atteindre le mont Penh avec son
temple, le chauffeur du minibus ne nous déposant même pas au Psar Thmei, le
vieux marché, centre de gravité de la ville et surtout point de départ de tous
les moyens de transport longue distance où nous espérions trouver un bus
directement pour Kampott où j’ai pour mission d’acheter du poivre. En effet
cette population énorme, cette activité débordante, ce stress intense ne nous
poussent qu’à fuir cette métropole tels de petits animaux apeurés.
Comme c’est étrange de
décrire ses première impressions d’un pays qu’on a déjà quitté…
Du temple, les tuk-tuks
demandant $3 pour nous amener au vieux marché, nous nous y rendons à
pied : il nous faudra un gros quart d’heure de marche. Là, le premier
chauffeur de tuk-tuk qui nous aborde, Monsieur Hout, nous apprend que les
minivans pour Kampott ne partent pas du Psar Thmei, contrairement à ce
qu’indique le Lonely mais d’un autre marché plus au sud-ouest. Je cherche
d’autres personnes pour confirmer cette information –qui s’avèrera exacte- et
Luke négocie finalement avec lui pour qu’il nous y emmène à un prix honnête et
nous aide une fois là-bas à trouver un minivan pour Kampott et nous obtenir le
prix payé par les locaux. Le tuk-tuk coûte $3 pour les deux, quant au minivan
ce sera $5 –un peu cher pour un prix de local mais bon, si nous voulons
absolument être à Kampott ce soir, il faut y mettre le prix. Enfin quand on
voit le confort offert, c’est tout de même un peu surévalué. En effet, le
minivan en question est plein à rabord avant même que nous arrivions –non de
gens comme nous en avions l’habitude jusque là mais de chargements
divers : meubles, paniers gigantesques, sacs de riz, matériaux de
construction, … Le haillon doit être maintenu par des sangles. Nous regardons
par la porte latérale où nous sommes sensés nous asseoir : il reste une
banquette sans dossier et passablement défoncée. Là, je m’installe à côté d’une
mère portant sa petite fille malade sur ses genoux. Luke sera encore plus
inconfortable : derrière moi, assis sur une planche de bois, les jambes
repliées sur la poitrine, dos à la fenêtre. Le départ, prévu à 19h, se fera
avec la demi-heure de retard règlementaire. La durée du trajet sera supérieure
à celle annoncée, comme d’habitude, avec de nombreux arrêts pour faire
monter/descendre de nombreux passagers. Ce sera d’ailleurs le cas à peine 5
minutes après le départ. Nous pensions que le minibus était plein.
Erreur ! Les « sièges » sur le moteur, dos au conducteur
n’étaient pas tous occupés. Au plus fort de la fête, nous serons jusque 14
personnes en rang d’oignons. Heureusement, plus nous approchons de notre
destination, moins de personnes restent à bord et nous découvrirons le confort
de l’inconfort mais avec de l’espace ! A un des nombreux arrêts, la mère
descend du bus et me met sa fille dans les bras le temps qu’elle achète quelque
chose. La pauvre petite fille malade dort et ne se rend compte de rien. Il est
22h passées quand on nous dépose, nous les 2 derniers passagers du minivan,
dans une rue d’une petite ville sensée être Kampott. Avec la carte du Lonely
Planet et une forte dose d’intuition, je comprends où nous sommes et devons
suivre une enfilade de rues non-éclairées pour rejoindre le coin de la ville où
se trouvent hôtels et restaurants. En effet, à cette heure aussi indue, deux
priorités s’offrent à nous : trouver un endroit pour manger et un pour
dormir. Difficile d’en prioriser un par rapport à l’autre mais nous nous
accordons sur l’ordre chronologique. L’idée de départ de manger les fameux
spare ribs « Rusty Keyhole » (dont Luke avait l’eau à la bouche
depuis qu’un mec à Don Det les lui avait recommandés) avait, le trajet du bus
s’éternisant, été raisonnablement considérée comme non-réalisable mais nous
commençons tout de même par nous renseigner au fameux restaurant. La cuisine
est déjà fermée ce qui est peu surprenant. Nous tentons un deuxième restaurant
baptisé d’après un personnage du Livre de la Jungle dont la
propriétaire/gérante anglaise était en train de former deux serveuses –tout
particulièrement leur anglais- qui nous donnera quelques conseils : un
endroit pour dormir et le seul endroit encore ouver pour manger. Nous nous y
rendons : un pub anglais, le « Red Bar » dont la femme du
propriétaire, une cambodgienne, nous invite à faire nos courses le lendemain à
côté de son restaurant de cuisine khmer et à y manger ensuite. Nous ingurgitons
bien vite mon curry (indien) et un plat de frites puis nous mettons à la
recherche d’un logement : il est quasiment minuit. Les endroits où nous
demandons tout d’abord coûtent des $6 ou 7. Nous marchons un peu plus vers la
rue où se trouvent 2 guesthouse bon marchés d’après le Lonely. Nous ne trouvons
là qu’une rue sombre et des portails fermés. Les seuls endroits où nous avons
l’occasion de parler avec âme qui vive sont complets sauf un hôtel de plusieurs
étages dont les voitures garées en bas ne nous disent déjà rien qui vaille –en
effet c’est $13 qu’on nous demande pour une chambre avec climatisation (plus de
chambres avec ventilateurs disponibles). Nous commençons à désespérer quand derrière une haute grille
blanche fermée nous percevons une voix qui nous offre un dortoir pour $4.
Beaucoup plus dans nos standards, nous nous empressons d’accepter. Nous
pénétrons en fait dans une chambre avec 3 lits dont un est déjà occupé par un
employé/stagiaire de la guesthouse qui se lève pour nous accueillir. Nous
posons nos affaires et tombons littéralement endormis malgré la meute de chiens
qui se met d’un coup d’un seul à hurler à la lune (ou à autre chose).
J25 : Kampott – Kep
– Kampott
Le réveil sonne très tôt,
8h30, aux vues de l’arrivée très tardive et de la courte nuit mais le programme
de la journée est clair : le matin visite de la ville (quelques bâtiments
coloniaux intéressants) et emplettes (poivre et autres cadeaux de noël), à midi
départ pour Kep pour passer l’après-midi sur la plage et rentrer le soir sur
Kampott pour se faire masser (Lucie m’avait chaudement encouragé à le faire,
chose non-encore réalisée à ce moment-là) et enfin cerise sur le gâteau pour
Luke : les spare-ribs du « Dusty Keyhole ». Dans la salle du
petit-déjeuner après une bonne douche, je découvre un ordinateur avec internet
gratuit. Parfait, une des choses du programme en moins à faire. Le temps
d’attente pour mon petit-déjeuner (salade de fruit et café) s’y prêtera
parfaitement. Le petit-dej de Luke, malgré plusieurs réclamations n’arrivera
jamais et nous partons avec tout notre équipement alors qu’il est encore à
jeun. La rue complètement noire et déserte de la veille se révèle très animée
le jour venu : de nombreuses guesthouse, des agences de voyage… Nous
entrons dans la Blissfull Guesthouse, voisine de celle où nous étions, et Luke
s’y renseigne : une chambre avec lit double et salle de bain privée est
disponible pour le soir même pour $5, soit seulement 2,5 par personne. La
comparaison ne faisant pas de doute, nous y disposons nos affaires et partons
pour la journée. A l’agence de voyage en question je me renseigne pour le bus
aller-retour pour Kep départ 13h retour 18h que je négocie à $5 avec pick-up à
la guesthouse. J’en profite également pour acheter le billet pour rentrer à
Phnom Penh par le premier bus le lendemain matin : 7h, $3 ;
rendez-vous 6h45 devant la guesthouse pour être amené au bus. Voilà donc la
journée organisée jusqu’au lendemain matin ! Nous trouvons rapidement le
magasin indiqué la veille au soir par cette femme dans le pub et y passerons un
certain temps, à cause de mes exigences : plutôt qu’un sac de 100g de
poivre à choisir entre blanc, noir et rouge, je lui demande de me faire 6 sacs
de 100g avec un tiers de chaque ce qui lui demande un certain travail pour
peser 33,33g 18 fois et faire toutes les opérations à la calculette. Une fois
que j’ai eu choisi 2 belles écharpes, nous la laissons finir de préparer et
allons acheter au supermarché voisin une serviette de bain pour $3 –il a oublié
la sienne à Don Daeng et la mienne n’a pas survécu à Kompong Cham. Luke qui
meurt de faim commande son lok-lak de petit-déjeuner/repas de midi au
restaurant khmer de la bonne femme juste voisin du magasin. Un petit tour en
ville jusqu’à une librairie ne nous laissera que le temps d’admirer le vieux
pont français mais pas plus puis retour à la guesthouse poser nos achats,
prendre nos affaires de bains dont 2 serviettes neuves et nous attendons à
l’heure dite (12h15) le tuk-tuk qui doit nous amener au bus. Il n’arrivera qu’à
13h –heure du départ prévu- mais le bus ne se situant qu’à une honorable
distance de 300 mètres que nous aurions parcourue à pied à peine moins vite,
nous sommes toujours à l’heure. Je passe au guichet pour changer les billets de
l’agence en billets officiels de la compagnie de bus (Sorya Phnom Penh) et
apprend que le retour n’est pas à 18h comme promis par le jeune de l’agence
mais à 17h. Il y a un autre départ à 16h également. Nous nous satisfaisons de
celui de 17h. Cela devrait tout de même nous laisser assez de temps pour
profiter de la baignade. Après à peine 40 minutes (vraiment la porte à côté) d’une
route pas terrible à travers les rizières de l’arrière-pays nous débarquons à
Kep, le St Tropez du Cambodge colonial. Un peu exagéré tout de même : en
gros une étroite bande de sable qui sert de plage au pied de collines
luxuriantes abritant de grosses villas. Le roi lui-même y a un palais ! Il
y a deux plages aussi nous longeons la côte pour trouver le meilleur spot de
baignade. La deuxième particularité de la ville de Kep ne manque pas de nous
sauter aussitôt aux yeux : les énormes sculptures kitsch ; cela va
d’une grande « femme de marin nue attendant le retour de son
époux » tout blanche sur une jetée, au crabe gigantesque au milieu d’un
rond-point et j’en passe. Le crabe, la spécialité culinaire de Kep mais le
retard du petit-déjeuner de Luke a ruiné le plan d’en manger dès notre arrivé
ici. Une fois atteint l’extrémité de la Coconut Beach, assez sale, plage un
terme étant assez exagéré, étant donné l’absence complète de sable ou de toute
surface plane permettant de descendre dans l’eau, nous faisons demi-tour et
retournons à la première plage, pas terrible, mais qui au moins justifie son
nom, malgré les invitations des gérants de bars à hamacs, un principe que je
n’ai vu jusqu’ici qu’au Cambodge, à nous restaurer ou nous désaltérer dans les
hamacs suspendus aux piliers de bois recouverts d’un toit de palme ou de bambou
et dont le sol est surélevé sur piloti –le tout avec vu sur la mer bien
évidemment. Une fois l’endroit propice trouvé nous posons à peine nos affaires
sur une chaise longue qu’une vendeuse de rue ne parlant pas un mot d’anglais
vient nous réclamer $1 par transat. Peu probable que lesdits transats lui appartiennent
ni même qu’elle les gérât ; enfin nous convenons avec elle (ou contre sa
volonté de $1 pour les 2 en échange de la surveillance de nos affaires lorsque
nous nous baignerons. Mais nous ne parviendrons pas à lui faire comprendre
cette close du contrat. D’ailleurs aussitôt l’argent reçu elle disparaît. Nous
pouvons enfin savourer de nager dans la mer de la Baie de Thaïlande avec de
nombreuses îles paradisiaques (dont l’île du lapin –Rabbit Island) et même le
Vietnam en ligne de mire. L’unique bain de mer du voyage, de l’année
même ! Quatre blonde déboule soudain juste un peu plus loin. Luke ne
manquera pas d’aborder la conversation en les prévenant de la petite arnaque
des chaises longues. Il apprend ainsi qu’elles sont suédoises et logent à Kep
mais ont loué un tuk-tuk pour les emmener à Kampott pour la soirée et quand
elles partiront, une viendra nous proposer de nous retrouver là-bas dans la
soirée. Elles acceptent de se joindre à notre dîner (les spare-ribs attendues
avec tant d’impatience), rendez-vous 19h30 donc. Vers 16h nous en avons fini
avec la baignade d’autant que la marée montante a recouvert l’eau
d’appetissantes algues vertes et la plage de tous les déchets de la terre alors
qu’elle était plutôt propre à notre arrivée. Le programme de la soirée, déjà
chargé, venant de se remplir d’une contrainte supplémentaire, je propose que
nous attrapions le bus de 16h mais faute de prise de décision, nous le voyons
passer sans avoir envisagé le moindre mouvement. Cela rallonge donc notre temps
de lecture et raccourci celui de la douche. Un quart d’heure en avance nous
sommes déjà installés sur le rebord du trottoir entouré de tuk-tuks dont les
chauffeurs jouent à jongler avec une mini-balle équipée d’un volant (proche de
celui du badminton), sport très populaire dans le sud-est asiatique et dont
j’aurai l’occasion de voir au long du voyage quelques techniciens affirmés
d’une très grande qualité. Un chauffeur plus âgé se contente de les regarder et
nous fera la conversation un moment, ne nous rassurant tout d’abord pas
tellement sur les chances de voir arriver notre bus –notre peur augmentant avec
le retard de ce dernier. Le vieil homme nous quitte et sera remplacé par un
français, propriétaire d’une guesthouse et qui se moquera de la nuée de
« mouches », les chauffeurs de motos et tuk-tuks se ruant à l’arrivée
du bus, le précédant même d’autant –alors que lui-même en se trouvant là ne
fait rien d’autre que la même chose : attendre les touristes pour les ramener
chez lui. Il ira même jusqu’à me donner sa carte dont je n’aurai que faire… Du
coup le soleil est couché et le retour se fera de nuit. Nous nous rendons
directement à la guesthouse consommer en vitesse les 2 bières pression offertes
par la maison pour chaque résident –nous voulions les emporter avec nous mais
l’offre n’est valable que pour une pression qui seront donc descendues vite
fait bien fait, une bonne préchauffe pour la soirée ! Une douche éclair,
direction centre-ville, au bord de la rivière qui est en fait la mer –il s’agit
d’une baie en fin de compte- où 2 échoppes de massage par des aveugles se font
face. Nous nous changeons dans l’arrière-boutique puis nous installons côté à
côté sur les tables de massage et un employé guidera les 2 masseurs aveugle
jusque nos tables. Après une brève discussion ils se mettent à l’œuvre. Ils
essaieront bien de faire la conversation –tout au moins le mien, le seul qui
parle anglais des deux- en m’apprenant des phrases en Khmer que j’aurai du mal
à répéter à travers le trou pour le visage de la table de massage tandis qu’il
me démonte le dos et que j’oublierai deux minutes plus tard. La relaxation
totale nécessaire pour profiter de l’intense travail musculaire et osseux du
dos n’est pas le meilleur prérequis pour assimiler du vocabulaire nouveau. Pour
un premier massage (pourtant spécialité locale de l’Asie du Sud-Est- l’expérience
sera très enrichissante et très bienfaisante. Une demi-heure plus tard nous
sortons comme neufs et revigorés et courons presque jusqu’au restaurant 200
mètres plus loin où les filles nous attendent sagement autour d’un verre de
bière. La mauvaise nouvelle qu’elles nous annoncent et que confirmera le
serveur c’est que les spare ribs sont déjà toutes parties. C’est un choc pour
Luke. Le choix sera donc plus difficile et il se rabattra sur une
assiette-grill incluant une rostbratwurst… lol. Peu intéressé par la cuisine
occidentale ce sera un plat local pour moi. Alors que les premiers plats
commencent à nous être servis, le couple à la table voisine reçoit une assiette
de spare ribs et les yeux de Luke suivant l’assiette volante furent tellement
évocateurs que notre voisin lui en offrît généreusement. Le dîner se déroulera
dans une très bonne atmosphère même si les suédoise auront tellement mauvaise
conscience de voir leur chauffeur les attendre devant le restaurant sans rien faire
alors qu’elles l’ont payé pour cela, qu’elles iront lui filer une rallonge pour
que la soirée puisse continuer jusque 23h-23h30. Elles n’auront pas la
permission de minuit en quelque sorte… Nous termineront par un whisky à la terrasse
d’un bar proche toujours en bord de mer puis les quatre cendrillons rentreront
se coucher à Kep et nous feront de même éprouvés par une bonne et longue
journée sans mentionner l’air marin ni le massage !
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